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Affichées le mercredi 11 février 2004 |
Haiti: la moité du pays échappe à Aristide |
Par François Hauter - LeFigaro, 11 février 2004 |
Haïti implose. Tout le Nord de l'île est entré en sécession contre le président Jean-Bertrand Aristide qui se bat maintenant pour le contrôle du territoire national. Hier, c'est Cap-Haïtien, la seconde ville du pays, qui était menacée par les forces rebelles. Celles-ci tiennent déjà une demi-douzaine de villes et les affrontements depuis une semaine ont déjà fait 42 victimes. Trois ans après son retour au pouvoir, Aristide entre dans la phase active de décomposition de son régime.
Les émeutes, dans ce pays, l'un des plus pauvres du monde, font réagir les agences des Nations unies : «Cette insécurité et cette violence nous font craindre une crise humanitaire majeure», déclarait, hier, Elizabeth Byrs, porte-parole du Bureau des affaires humanitaires de l'ONU (OCHOA), «l'OCHOA est préoccupée par cette détérioration de la situation humanitaire due à la violence, l'insécurité et les catastrophes naturelles comme les récentes tornades qui ont dévasté le pays, laissant 25 000 personnes sans nourriture dans les villages du nord», a-t-elle ajouté.
L'ONU, les Etats-Unis et la France réagissent, pour le moment sans agir. Kofi Annan, le secrétaire général de l'ONU, annonce que son organisation va «très prochainement» augmenter son engagement en Haïti, sans davantage de précisions. Les Etats-Unis, à travers le porte-parole du département d'Etat, Richard Boucher, fustigent le gouvernement Aristide : «Il y a des bandes violentes, des brutes, des deux côtés qui ont été impliquées dans des actes violents, regrette-t-il, avant d'ajouter : «La réaction du gouvernement a contribué assez souvent à la violence.» La France est plus laconique : elle «appelle à l'arrêt immédiat des violences d'où qu'elles viennent et au respect des règles de droit».
On en est très loin sur le terrain. Alors que dans toutes les villes tombées aux mains des forces rebelles - des bandes disparates de pilleurs -, les policiers avaient donné le signal de la curée en désertant leurs commissariats, les derniers partisans d'Aristide à Cap-Haïtien se barricadent : l'agence Associated Press rapportait qu'hier matin les derniers défenseurs du chef de l'Etat érigeaient des barricades autour de la ville, pour pouvoir la défendre contre les «rebelles».
Ces forces de soudards sont devenues incontrôlables. Formées d'anciennes bandes de voyous armées par le régime d'Aristide (les «chimères») et trahies par lui lorsqu'elles devenaient trop puissantes, elles n'ont pour seule motivation que de se tailler des fiefs et de faire régner un ordre barbare, en attendant de négocier les conditions financières de leur reddition. Armés d'AK 47, de fusils à pompes et de machettes, ils pratiquent une justice effarante. la Coalition nationale pour les droits des Haïtiens (NCHR) rapportait, hier, que dans la ville des Gonaïves, «un policier blessé transporté à l'hôpital la Providence a été arraché sur la table d'opération et exécuté en public par les membres du front de résistance de l'Antibonite. Un présumé voleur a aussi été exécuté dans cette ville. Les corps des policiers tués n'ont pas été remis à leurs parents pour inhumation, ils ont été carbonisés en public».
Les nervis armés par Aristide pour défendre son pouvoir, des voyous des bidonvilles, ne sont pas en reste. «Au moins cinq partisans de l'opposition ont été exécutés sommairement par les partisans armés du pouvoir» dans le bidonville géant de Cité Soleil, constate le NCHR, en précisant que «les journalistes de la presse libre sont dans la ligne de mire du pouvoir. Une liste de journalistes, de militants des droits humains, de personnalités politiques et de personnalités du secteur privé à abattre circule à Port-au-Prince».
Jean-Bertrand Aristide, qui a dissous l'armée pour ne plus compter que sur une force de 5 000 policiers, voit sa politique d'anarchie programmée lui revenir au visage comme un boomerang. Ses bandes de malfrats, qui avaient instauré un régime de terreur dans toutes les grandes villes du pays, sentent le pouvoir affaibli et deviennent de redoutables électrons libres. Le premier ministre, Yvon Neptune, avouait hier son impuissance : «La police nationale ne peut plus restaurer l'ordre seule», déclarait-il. Comme c'est déjà arrivé au cours de la si terrible histoire d'Haïti, de vastes régions échappent désormais au contrôle de Port-au-Prince. Dans ce climat de violence absolue où le pouvoir d'Aristide se décompose tragiquement, l'opposition refuse de s'associer aux exactions des bandes armées insurgées.
«Nous ne nous reconnaissons pas dans l'insurrection armée, déclarait lundi Misha Gaillard, un politicien local proche de la plate-forme des personnalités qui ont lancé l'an dernier le mouvement contre Jean-Bertrand Aristide. Andy Apaid, qui dirige le groupe dit des 184 (une vaste coalition des forces civiles haïtiennes) et l'opposition la plus responsable au régime actuel, déclarait hier à Libération : «Nous sommes face à une situation presque insurrectionnelle qui s'aggrave. Un mouvement qui n'est pas coordonné. (...) Nous, nous tenons à ce que notre mouvement pacifiste reste la référence politique pour aider notre pays à sortir de cette situation.»
De fait, l'opposition haïtienne n'a strictement aucun moyen de contrôler le pays, qui sombre dans une révolte anarchique et sanglante, les bandes de malfrats armés par le pouvoir réglant leurs comptes sauvagement. Face à cette énième décomposition du pouvoir haïtien, les Etats-Unis, l'ONU et la communauté internationale n'éviteront pas une nouvelle intervention militaire pour ramener la paix dans cette première république noire, qui célèbre si dramatiquement son bicentennaire.
Affichées le lundi 9 février 2004 |
Washington accuse le gouvernement haitien de contribuer à la violence |
Par Agence France-Presse |
WASHINGTON, D.C., 9 fév. - Le gouvernement haïtien du président Jean Bertrand Aristide contribue assez souvent à la violence en Haïti, a déclaré lundi le porte-parole du département d'État Richard Boucher, en condamnant les affrontements de ces derniers jours et en appelant à la négociation.
«C'est une situation très compliquée», a-t-il ajouté. «Le gouvernement a répondu» aux actes de violence «avec un mélange de police et de gangs pro-Aristide», qui ont érigé des barricades de pneus enflammés dans plusieurs villes.
«Il y a différents groupes (...), des bandes violentes, des brutes des deux côtés qui ont été impliquées dans des actes violents». «Nous pensons que la réaction du gouvernement a contribué assez souvent à la violence», a précisé Richard Boucher à des journalistes.
«Les États-Unis condamnent fermement la dernière vague de violences en Haïti. Nous déplorons profondément la perte de vies humaines lors des attaques aux Gonaïves, Saint-Marc et dans d'autres villes. Nous appelons le gouvernement d'Haïti à respecter les droits, spécialement les droits de l'homme, de tous les citoyens et résidents d'Haïti. Et nous appelons tous les Haïtiens à respecter la loi», a souligné le porte-parole.
«Les problèmes d'Haïti ne seront pas résolus par la violence et les châtiments. Seul le dialogue, la négociation et les compromis peuvent aider Haïti à trouver une solution à ses problèmes.
Haïti est secoué depuis jeudi par des affrontements entre policiers et groupes armés de l'opposition qui réclament la démission du président.
Alerte rouge pour les prochains jours |
Par wehaitians.com |
TROIS COMMANDOS SOUS ORDRE DES SECRETAIRES D'ETAT MARIO DUPUY ET JEAN CLAUDE JEAN-BAPTISTE SONT A LA RECHERCHE DE KPLIM (Evans Paul), ANDY APAID ET DANY TOUSSAINT POUR LES ASSASSINER SANS DELAI.
Commando 1: Ayant à sa tête le Tueur TOUPAC de Cité soleil a pour mission d'assassiner KPLIM (Evans Paul);
Jean-Baptiste, l'un des architects de l'assassinat sauvage du feu le Réverend Sylvio Claude, le 30 septembre 1991, dans la ville des Cayes, au sud d'Haiti. (photo/AP, archives) |
Command 2 : Ayant à sa tête HEROLD (Alias Balle à la Tête) de Cité Soleil a pour mission l'assassinat de ANDY APAID;
Commando 3: Ayant à sa tête le nommé WILME (Cité Soleil) a pour mission l'assassinat de DANY TOUSSAINT.
D'AUTRES COMMANDOS SE PREPARENT POUR D'AUTRES MISSIONS, NOUS VOUS TIENDRONS AU COURANT.
La police echoue a reprendre le controle de la ville de Saint-Marc |
Par France-Presse |
PORT-AU-PRINCE, 9 fév (AFP) - La police a échoué lundi à reprendre le contrôle de la ville de Saint-Marc, à une centaine de kilomètres au nord de Port-au-Prince, reculant devant des tirs nourris, selon des habitants contactés par téléphone par lAFP.
Dans un premier temps, des habitants avaient indiqué que plusieurs dizaines de policiers motorisés, arrivés en renfort de Port-au-Prince, avaient réussi à gagner le commissariat de la ville tombé aux mains dopposants armés au président Jean Bertrand Aristide.
Finalement, la reprise du commissariat a échoué, et après une fusillade nourrie, une colonne de véhicules de la police a été vue rebroussant chemin pour aller se positionner à lentrée de cette ville de 160.000 habitants.
En milieu de journée, les renforts policiers se trouvaient à lentrée de Saint-Marc, près dun poste de police de la localité voisine de Freycineau.
Deux bandes rivales se disputent le contrôle de Saint-Marc depuis ce week-end. Les policiers étaient venus prêter main-forte aux militants pro-Lavalas (au pouvoir) du mouvement local "Balai Rouzé" face à une bande armée appelée Rassemblement des militants conséquents de Saint-Marc (Ramicos).
Ce groupe Ramicos, se réclamant de lopposition, avait incendié samedi le commissariat et sétait emparé darmes et de munitions après le départ en catastrophe des policiers qui loccupaient.
Haiti: le soulèvement s'étend à neuf villes |
Par Agence France-Presse |
PORT-AU-PRINCE, Haiti, 9 fév. - Le soulèvement en Haïti s'est étendu lundi: les opposants au gouvernement se sont emparé de neuf villes dans l'est de l'île et le bilan a atteint au moins une quarantaine de morts. Il s'agit de la plus vaste contestation jamais opposée au président Jean-Bertrand Aristide.
Des rebelles armés ont lancé l'assaut jeudi aux Gonaïves (Nord-Ouest), incendiant le commissariat de cette ville, la quatrième du pays. Les policiers et les fonctionnaires ont fui. "Nous sommes dans une situation d'insurrection populaire armée", a déclaré l'ancien colonel Himler Rebu, un opposant qui avait mené un coup d'Etat avorté contre le général Prosper Avril en 1989.
Les violences touchent surtout l'ouest du pays. Le bilan de 40 morts a été établi à partir de témoignages , du responsable de la Croix-Rouge Raoul Elysée, des chefs rebelles Winter Etienne et Jean-Yves Narcisse, et des radios locales.
Durant le week-end, les opposants ont pris la ville portuaire de Saint-Marc, à 70km de Port-au-Prince. Des conteneurs ont été pillés, des centaines de personnes volant téléviseurs, matelas et sacs de farine.
Les habitants de plusieurs villes en bloquaient l'entrée à l'aide de troncs, de voitures et de pneus en flammes. Les rebelles barrant la route vers Saint-Marc ont expliqué à la presse que s'ils entraient en ville, ils ne pourraient plus retourner à Port-au-Prince.
Le principal groupe rebelle est le Front de résistance des Gonaïves. Ce mouvement, auparavant pro-Aristide, terrorisait les opposants avant de se retourner contre le président. Aux Gonaïves, il a été rejoint par d'anciens soldats de l'armée haïtienne dissoute. Les rebelles ont le soutien de la population locale. Mécontents de la pauvreté croissante, de la corruption et des crises politiques, les habitants ont formé des comités de quartier.
L'insatisfaction couvait en Haïti depuis que Jean-Bertrand Aristide a remporté les législatives -entachées d'irrégularités- en 2000 et que les donateurs étrangers ont bloqué des millions d'euros d'aide internationale. L'opposition refuse de participer à tout nouveau scrutin si Aristide ne démissionne pas. Le chef de l'Etat entend aller jusqu'au bout de son mandat présidentiel qui n'expire qu'en 2006.
"La France suit avec inquiétude l'évolution de la violence en Haïti", a indiqué lundi le ministère des Affaires étrangères en appelant à "l'arrêt immédiat des violences, d'où qu'elles viennent, et au respect des règles de droit". AP
cb/v0466/Bg
Haiti: l'épreuve des armes |
Edito international du 09/02/2004
Michèle Gayral. © Marc Verney/RFI L'attaque contre le commissariat central des Gonaïves qui a servi de détonateur à l'insurrection qui s'étend un peu plus chaque jour, était le fait d'un groupe armé aux antécédents plus que douteux. Le Front de résistance de l'Artibonite n'est autre, en effet, que ce qui s'appelait auparavant, et sans autre précaution oratoire, l'Armée cannibale. Il s'agissait d'une organisation populaire, détournée de son cadre premier de structure locale participative par le pouvoir lui-même qui, en l'armant, en avait fait l'une de ces milices vouées aux pillages et autres exactions, impunément pourvu que les opposants au président Aristide en fussent les cibles. Le changement de camp du clan date de l'assassinat, en septembre dernier, de son chef. Assassinat que l'Armée cannibale avait mis sur le compte du président censé vouloir faire taire un partisan devenu encombrant, et contre lequel elle s'est violemment retournée depuis. Un recyclage propre à inspirer quelque méfiance aux autres organisations anti-Aristide dont l'objectif est aussi de chasser le président mais par des voies pacifiques. Tant l'Opposition traditionnelle, dont les divisions expliquent et l'impuissance et un relatif discrédit, que la société civile qui a tenté de s'organiser au sein du «Groupe 184», préfèrent, elles, s'appuyer sur des manifestations répétées et, plus récemment, des actions de désobéissance civile.
La rébellion actuelle a d'autant plus de chances de se propager qu'elle pourrait bien bénéficier d'un certain nombre de circonstances favorables. D'abord la lassitude d'une bonne partie de la population envers un président taxé de mauvaise gestion et de corruption. Ensuite, l'évident manque d'ardeur à défendre ou à reconquérir ses commissariats d'une police embrigadée parfois à son corps défendant dans les basses oeuvres du régime. L'armée, elle n'existe plus, depuis qu'en un de ces gestes populistes qu'il affectionne, Jean-Bertrand Aristide l'a dissoute pour mettre fin aux risques de coups d'Etat. Quant aux «Chimères», ces jeunes des bidonvilles toujours prêts contre de menus avantages à aller intimider le manifestant et débusquer l'opposant, ils sont eux aussi susceptibles de se retourner contre des donneurs d'ordres qu'ils sentiraient en position de faiblesse. Quoique le président, du fond de la résidence-forteresse où il se tient retranché, soit manifestement toujours en mesure de mobiliser, en tout cas à Port-au-Prince, de nombreux partisans.
S'il s'estimait toutefois assez menacé pour abandonner le pouvoir, son départ ne suffirait guère à rassurer: il aurait en effet été obtenu par l'action armée d'un groupe qui, avant d'être touché par la grâce révolutionnaire, avait tout d'un gang; et ce bien que ses chefs aient jugé utile de garantir à l'Opposition qu'ils n'abuseraient pas d'une éventuelle victoire. Comme si décidément le pays le plus pauvre d'Amérique, et le peuple le plus constamment en butte aux violences croisées des pouvoirs et contre-pouvoirs qui se disputent le droit de régner sur sa misère, n'avaient éternellement le choix -si l'on peut dire- qu'entre des inconvénients. Michèle GAYRAL
Ecoutez l'édito international sur RFI, du lundi au vendredi, à 05h10, 10h40, 11h40 et 16h40 (temps universel)
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